De l’intérêt de collaborer avec des startups pour des grands groupes dans un contexte post-crise du Covid-19

Avis experts

Bien entendu chez Startup Palace, nous n’avons pas une boule de cristal pour vous parler de ce que certains appellent le « monde d’après ». Mais, nous avons souhaité vous partager quelques réflexions qui nous renforcent dans notre conviction : il sera encore plus important à l’avenir pour les grandes entreprises de collaborer avec des startups. Notre approche est forcément biaisée par plusieurs années de pratique sur le sujet, mais cette crise nous a, néanmoins, permis de renforcer la vision que nous portons depuis 5 ans. Ces précisions faites, voici nos premières réactions à chaud.

Une querelle digne des Anciens vs les Modernes sur ce sujet

Face à cette crise, deux écoles peuvent s’affronter : les défenseurs d’une position conservatrice sur les investissements (que ce soit en temps de collaboration, en argent sonnant et trébuchant ou en charge mentale du poids du changement) dans des projets « startups », versus les partisans de la nécessité d’investir dans des projets de modernisation de l’entreprise via notamment la collaboration startup-grand groupe. Un éclairage sur le sujet nous a été apporté par Roxanne Varza, directrice de Station F, dans une lettre adressée à la communauté de Station F le 21 avril dernier :

« Depuis le début de cette crise, les startups ont montré tout ce qu’elles apportent à notre société en temps de besoin. De nombreuses entreprises ont rapidement fournit des produits et des services pour l’industrie médicale, mais aussi de nombreuses autres solutions qui nous ont permis de vivre et de travailler confortablement lors du confinement. Nous avons assisté à une adoption massive des services en ligne et numériques, qu’il s’agisse de solutions de travail à distance, de plateformes d’éducation, de livraison en ligne ou même de santé et de divertissement. (…) Le saut technologique que nous avons connu ces dernières semaines représente une énorme opportunité. »

À l’évidence, les startups ne sont pas les seules à avoir apporté des solutions lors de cette pandémie, ne tombons pas dans les excès de la « Startup Nation ». En effet, beaucoup de grands groupes, ETI, PME ou TPE ainsi que le secteur public ont aussi oeuvré en ce sens. Nous n’avons pas de réponse unique à cette querelle même si nous penchons fortement vers les Modernes (oui ok c’est aussi plus trendy). Forcément cela dépend beaucoup du contexte de l’entreprise mais les démarches offensives peuvent s’inscrire aussi dans une logique de frugalité, alors pourquoi pas « faire un shift » Messieurs les Anciens ?

Une chose sera tout de même clef : il faudra se poser pour repenser ses priorités et ne plus rester dans un statu quo car la fracture numérique notamment ne peut plus durer. Mangeons des Apple et autres car trop de personnes n’ont pas eu le déclic d’ouverture à des solutions agiles, gratuites ou peu chères et accessibles. Cette fracture est aussi sociale comme aurait dit Jacques. Mais pas que finalement…

Se donner du temps pour ne pas insulter l’avenir

Les startups ont beaucoup de contraintes et vivent beaucoup de galères. Mais elles ont notamment une grande chance : elles choisissent elles-mêmes les outils avec lesquels elles veulent travailler au quotidien. Leur système d’information (SI) n’est pas subi mais choisi et ce même sans grands moyens financiers. Le choix de leurs outils et de leur SI est optimisé afin d’obtenir le meilleur service adapté à leur niveau de maturité au prix le plus juste.

Il ne faut plus attendre d’être acculé pour aller plus en avant dans l’innovation afin d’éviter d’avancer dans la douleur et sans préparation sur la digitalisation ou la mise en place de nouvelles méthodes de management par exemple. Ça devient plus que stratégique désormais.

Au début du confinement, il a été intéressant de noter que beaucoup de grands groupes ou d’entreprises de taille moyenne se sont rendus compte qu’ils n’avaient pas ouvert certains « chantiers » capitaux dont la pertinence leur ont pourtant été remontée, et ce depuis longtemps, par leurs collaborateurs.

Tous ceux liés aux télétravail et les conséquences sur les SI en sont les meilleurs exemples. Nombre d’entreprises ont été obligées d’en créer les conditions à marche forcée en se rendant compte qu’elles étaient à l’arrêt faute de pouvoir travailler Day-one, le 17 mars.

« Comment mon SI peut fonctionner hors des murs, alors que depuis plus de 15 ans les outils que mes collaborateurs utilisent dans leur vie personnelle sont beaucoup plus performants que ceux fournis par l’entreprise ? Comment pouvons-nous collaborer à distance ? Comment pouvons-nous optimiser nos déplacements ? »

À croire que ne pas se poser ces questions dans le « Monde d’avant » servait à ne pas contrarier le business de certains, la position de quelques managers ou la zone de confort de DSI (#théorieducomplot).

D’après une étude récente de Terra Nova, 78% des salariés estiment que leur entreprise était « peu » ou « pas » préparée au confinement. Et 27% trouvent qu’elle s’est adaptée difficilement. (JDD, 3 mai 2020)

Toujours, selon le JDD, seul 7% des salariés en France pratiquait le télétravail avant l’arrivée du Covid-19. Après, nous ne sommes qu’en 2020, Internet n’en est qu’à ses balbutiements….

Ensuite, nous sommes bien d’accord, ce que nous avons vécu lors du confinement ne correspond pas à un « vrai télétravail » aussi bien dans les modalités de prise en charge de certains coûts par les entreprises, que par la limitation des déplacements à son bureau quelques jours par semaine ou que par la « gestion » des enfants pour les parents sur les heures de travail.

« Ah tiens Zoom, ça marche bien ! On aurait pu utiliser cette solution pendant les dernières grèves non ? » « On bosse plus en télétravail qu’au bureau car on n’est pas sans cesse interrompu ? » « Tiens Teams ou Slack, c’est beaucoup plus productif que les mails qu’au bout de 30 ans mes collègues n’ont toujours pas compris comment bien utiliser ? » « Pourquoi faire 2 heures de trajet Aller/Retour certains jours pour seulement 2 réunions mal préparées ? » Difficile maintenant pour un employeur de forcer son salarié à venir au bureau lors des prochaines grèves (même sans boule de cristal, on peut affirmer sans trop prendre de risque qu’elles vont réapparaître).

À l’inverse, pour ne pas être trop manichéen, un grand coup de chapeau est à donner à beaucoup de DSI qui ont travaillé jour et nuit pour répondre à ces nouvelles contraintes, démontrant qu’elles pouvaient être aussi agiles que des startups. Vous voyez, c’est possible les gars (terme non inclusif mais dû au genre des correcteurs)* !

Il conviendra donc d’essayer de challenger ses méthodes de travail constamment en écoutant les besoins des collaborateurs et en respectant au mieux leur bien-être (lapalissade numéro 23 dans le manuel).

Ce bon vieux Test and Learn adossé à une curiosité et à un optimisme permanent

EricSteve et les autres si vous nous lisez, vos préceptes doivent encore plus se répandre (oui, ok il n’y a pas que du bon non plus dans le Lean Startup, on s’entend).

« Le Monde change vraiment » comme disait Charles et il le disait déjà bien avant cette période trouble. Il est désormais impensable de ne pas tester (très) régulièrement de nouveaux outils. Vous devez devenir addict à Product Hunt. Le mindset « comment je maintiens mon SI existant » doit être remplacé par celui qui vous murmure sans cesse dans l’oreillette « Il existe sans aucun doute une solution nouvelle pour ça ! ».

Si vous avez un problème, il est fort probable que beaucoup d’autres personnes ont connu la même situation que vous. Des individus ont donc déjà sûrement tenté de résoudre ce « pain point », à l’autre bout du monde ou peut-être à quelques mètres de vous. Et, ils ont réussi à créer une bonne réponse à ce problème: Product Market Fit quand tu nous tiens!

Apprendre à chercher puis chercher et ne pas hésiter à demander aux autres.

La startup Logpickr nous confiait récemment que très souvent, à la fin de leur démonstration, leurs interlocuteurs n’avaient même pas imaginé qu’une telle solution pouvait exister. Pensez à l’impossible et au-delà car il est peut-être déjà disponible !

Bonus : vous pouvez faire des économies de temps et d’argent. Chez Startup Palace, nous avons récemment utilisé, pour faire des montages vidéo, Clideo (trouvé en 5 minutes, coût 11€ et 1h30 d’utilisation) alors qu’un logiciel lourd nous auraient coûté beaucoup plus cher et que nous aurions dû mobiliser une ressource largement plus longtemps.

Copiez avec fierté ! Inspirez-vous de l’existant ! N’ayez pas peur de faire des erreurs ! Faire des erreurs n’est pas un échec, c’est un apprentissage. Par contre l’échec, c’est de ne pas apprendre de ses erreurs et de les répéter.

Ne regardez plus d’un mauvais oeil celui qui a fait un gros « fail », il aurait très bien pu réussir !

Même dans des secteurs comme la Santé, il est possible de tester/itérer efficacement et rapidement comme en témoigne le projet MakAir porté par le collectif Makers for life. Big up au passage à Quentin et à sa team qui s’est auto-confinée au Palace à Nantes dès mi-mars. Ils ont mis au point un respirateur dans le cadre du Covid-19 en quelques semaines, en open-source et dix fois moins cher que les autres produits du marché. Une « core team » super agile, les bonnes personnes autour de la table, 250 contributeurs dans un Slack, des grands groupes pour passer à l’échelle, un appui des Pouvoirs Publics, un climat de confiance immédiat, pas de communication avant d’avoir des premiers assets tangibles et un fonctionnement militaire où chacun connaît son rôle et n’hésite pas tester et retester encore jour et nuit, encore et encore.

Allez donc prendre des Good Vibes avec ce projet. Des startupers et des grands groupes qui collaborent, ça marche on vous dit !

Sortir du cadre et innover sous contraintes

Nous avons eu l’occasion pendant le confinement de connaître un nouveau rapport au temps, de reprendre la main sur notre attention et sur notre temps de cerveau disponible. Maintenant, gardez toujours cette parenthèse en tête, pour savoir vous arrêter ponctuellement pour prendre du recul. Pas de stress, personne ne va vraiment vite dans notre Monde (spoiler: Usain Bolt est en retraite), pas même les startups. Vous ne perdrez ni votre temps, ni celui des autres.

Explorez votre business sous d’autres angles pour essayer de trouver de nouvelles opportunités ou gisements de valeurs.

Dans un workshop intitulé « Innover sous contraintes » que nous adorons animer chez Startup Palace, imaginé par le meilleur d’entre-nous Franck Louesdon, nous donnons des contraintes aux startups (oui, on est taquin, elles en ont déjà pas mal) afin qu’elles se forcent à sortir du cadre, car ce n’est pas inné :

  • imaginez que demain tous vos interlocuteurs sont des enfants !
  • que devez-vous faire pour perdre tous vos clients en 15 jours ?
  • associez-vous à un partenaire improbable et imaginez un business en commun ?
  • vous devez être 10 fois plus quelque chose demain ?
  • et pleins d’autres questionnements…

… finalement nous ne sommes pas si malicieux voire nous sommes même des petits joueurs, nous n’avions pas imaginé un confinement total paralysant l’économie mondiale.

Nous innovons souvent face à des imprévus ou face à des difficultés que nous devons dompter ou contourner. Les dernières semaines l’ont encore démontrées.

Un exemple éclairant : celui de Weldom. Il nous a été poussé par la startup Comm’une opportunité dans le Slack de La Cabine, l’accélérateur porté par la CCI Vendée. Rendons à César.

Weldom a vu ses commandes en ligne multipliées par 200. L’enseigne est devenu plus agile, plus digitale et quelquefois en seulement 48 H !

« Entre le 17 et le 19 mars, Weldom est passé au 100% digital et 100% agile, et on ne reviendra pas en arrière » 

Edouard Deville directeur Offre / Marketing / Projets Magasins chez Weldom

Sous la contrainte, les banques ont, par exemple, réussi à créer des « fast track » pour mettre en place des PGE (Prêt Garanti par l’Etat) en s’affranchissant de leurs process traditionnels face à l’urgence de leurs clients. Certes les encours sont garantis par l’Etat me direz-vous, mais cela pèse tout de même sur leurs ratios.

Questionner et repenser ses process, les startups sont un superbe « outil » pour vous en donner l’occasion très chers grands groupes!

Sortez aussi du cadre au niveau des diplômes dans vos recrutements externes et internes, jugez les candidats sur leurs actes et leurs réelles « soft skills », pas celles présumées par un bout de papier glané il y a des années ou au siècle dernier. L’éducation est devenue une commodité et la notion de « formation tout au long de sa vie » n’a jamais été aussi tangible et accessible.

Prenons le monde de la Santé une nouvelle fois, la crise sanitaire a accéléré des innovations auprès de ses corporations parfois réfractaires aux changements. La contrainte a fait changer les mentalités, certaines startups ont bénéficié de cette conjoncture et ont récolté le fruit de leur travail de sape d’évangélisation :

  • Valwin, une solution numérique pour les pharmaciens, a vu son usage de Click&Collect se démocratiser,
  • Captain Vet’, un solution numérique pour les vétérinaires, qui a développé des fonctionnalités de télé-consultation en 4ème vitesse car l’ordre de la profession a ouvert les vannes sur le sujet face à la situation,
  • Doctolib, que l’on ne présente plus, avec le développement de la télé-consultation également.

Attention, ces startups ont aussi un excellent produit, tout n’est pas lié à un effet d’aubaine.

Des usages plein de Sens et de bon sens ont aussi explosé sous les contraintes issues de la situation de confinement :

  • Shopopop, une solution de livraison de courses par des particulier, a vu un grand acteur de la GMS se décider, à savoir Carrefour pour ne pas le nommer, à utiliser leur plateforme,
  • Benevolt : la plateforme de bénévolat au service des associations a vu son nombre d’utilisateurs actifs doubler en 3 mois et du même temps à réussi à débloquer un partenariat avec la Croix Rouge qui a généré plus de 7000 inscriptions de bénévoles.

Innover sous contraintes: une méthode soit-dit en passant qui pourrait aussi être utile face à l’urgence climatique. Indice chez vous.

Nous le savons: sortir du cadre et innover sous contrainte, cela peut faire peur. Pour garder le cap, écoutez Simon Sinek en restant fidèle à votre Why comme guide. Sortez du cadre en rentrant dans votre Cercle d’or.

Pensez local de votre commune à l’Europe

À l’heure où l’on parle beaucoup de relocalisation industrielle, pensez aussi local pour votre transformation ! N’ayez pas, dans le choix de vos solutions, toujours le réflexe GAFA. Choix souvent tellement plus simple, tellement plus rassurant parfois pour vos services achats ou opérationnels de choisir IBM ou AWS, par exemple, que le challenger européen qui sera plus enclin de se défoncer pour vous.

Alors, nous vous proposons quelques alternatives non exhaustives :

Golem.ai — AfterData — Verteego & d’autres VS IBM Watson (on ne met pas le lien na)

Clever Cloud VS AWS (on ne met pas le lien na)

Whereby VS Zoom (on ne met pas le lien na)

Oktave VS SurveyMonkey (on ne met pas le lien na)

Crisp — iAdvize VS ZenDesk (on ne met pas le lien na)

Nous sommes un peu geek donc nous vous parlons beaucoup d’outils, nous vous l’accordons. Mais les changements plus culturels ou de postures sont aussi, nous l’avons un peu dit, à prendre en compte dans cette véritable révolution. Nous ne vous disons pas que tout va se faire facilement mais nous sommes face à une opportunité historique.

Les 3 conclusions possibles

#LaConclusionLyrique

Chers lecteurs, chères lectrices, Carthago Delenda Est ! Cette crise sanitaire, ne marque-t-elle pas le vrai passage du 20ème au 21ème siècle ? Car la bascule séculaire se fait rarement lors de l’année 0 (la peur du bug peut-être) : mort de Louis XIV en 1715, seconde chute de Napoléon en 1815, la Grande Guerre de 14–18… Bon, arrêtons-nous là car le tropisme est peut-être un peu trop franco-français…

#LaConclusionAutoPromo

Bien que la ficelle est grosse et que nous prêchons pour notre paroisse, c’est-à-dire celle de Startup Palace dont le job est de faire collaborer des startups et des grands groupes, nous affirmons avec un ton péremptoire la conclusion suivante:

« Nous vous obligeons à suivre à la lettre tout ce qui est écrit dans ce post car il est le fruit de notre expérience et est incontestable. CQFD »

Pour bénéficier de nos lumières, contactez-nous via notre website ou par mail sur turfu@startup-palace.com.

#LaConclusionConstructive

Pour continuer à alimenter votre réflexion, une fois n’est pas coutume, nous nous rangerons dans le camp des Anciens qui louaient le temps de l’Antiquité, le temps des bâtisseurs romains, en vous encourageant fortement à lire cet article sur le blog d’Andreessen Horowitz alias a16z pour les intimes: IT’S TIME TO BUILD.

Alea Jecta Est, nous avons bien franchi le Rubicon.

Florian

*Remerciements pour les « correcteurs » : Julien, Thibault, Grégory, Céline, Franck, Jérôme et Mathieu (oui ok sur la parité on n’y est pas, donc l’article est très critiquable, on ne peut que plussoyer)

Pour aller plus loin :
La co-création, accélérateur des startups à impact